• Durant le trajet vers Châlons-sur-Marne, Jean-François ne cesse de me parler de Sophie.

    -Elle a toute les qualités cette jolie dame, tu penses que j’ai des chances ?

    -Et ton épouse ?

    -Tu as eu le temps de la juger, depuis notre retour en France elle est désagréable.

    Nous sommes bien reçus par les policiers de Châlons mais ils nous dirigent vers un commissariat de banlieue.

    - Nos collègues vous guideront vers le véhicule, ce sont eux qui ont traité cette affaire.

    Nous apprenons que la voiture a été découverte seulement le 19 janvier, soit une semaine après la disparition d'Anne, personne ne m'avait parlé de ce décalage.

    - Normal, un secteur désert, la Marne en crue, terrain peu propice aux promenades, ce véhicule nous a été signalé par un riverain qui avait déjà aperçu la Clio la veille au matin, il avait attendu le lendemain pour nous prévenir, la voyant toujours à la même place.

    - Elle n'était donc pas à cet endroit le 17, l'avant-veille?

    - Allez savoir,  un brouillard épais noyait  la vallée depuis une huitaine, avec la distance, quant aux traces de pneu,  dans ce secteur elles sont difficiles à déceler, l’endroit est plutôt sablonneux.

    - Le voisin n'avait rien entendu?

    - Non, mais d'autres chemins mènent au bord de la rivière, à partir de la route, il est facile de descendre vers la berge.

    Après avoir décliné nos coordonnées complètes, signé des documents, nous sommes dirigés vers  la fourrière, de nombreux véhicules attendent d'éventuels propriétaires, leur état n'est pas brillant; la petite voiture d'Anne paraît toute pimpante malgré sa couche de poussière blanchâtre.

    Une odeur indéfinissable flotte dans l'habitacle, mon super nez sèche et ne parvient pas à mettre un nom sur ces relents, un parapluie de femme sous le siège, rien dans le coffre.

    - Vous avez vidé cette voiture?

    - Non, nous avons enlevé les papiers que voici, il doit rester une ou deux cartes routières dans le vide-poche, c'est tout.

    En effet, Jean-François découvre deux cartes, un crayon à bille et dix centimes.

    Je pense aux bouteilles d'eau qu'Anne devait transporter au minimum elle, ou alors elle les avait déposées quelque part en passant pour une  nouvelle analyse?

    - Laurent, regarde, deux mégots dans le cendrier.

    - Anne fumait?

    - Je l’ignore, mais cela m’étonnerait ?

    - Des gitanes il me semble.

    - A plus forte raison.

    - Laisse-les en place, nous passons à la gendarmerie pour signaler cette présence incongrue.

    Ca y est, l'odeur, un fruit pourri.

     Je fouille les recoins de l’habitacle et je mets la main sur un amalgame peu ragoûtant, cela ressemble à une pomme entamée  fossilisée.

    - Bien entendu, tu ne sais non plus pas si elle mangeait des goldens?

    - Pourquoi tu arrives à reconnaître  une golden dans ce vieux trognon?

    - Non, mais une pomme je suis à peu près sûr.

    - En admettant que ce soit elle qui ait croqué dans ce fruit, ce serait étonnant qu’elle abandonne le morceau sous le siège.

    - C’est également mon avis, un fumeur mangeur de pommes l’accompagnait.

    Avant de sortir de la ville, Jean-François fait le plein, le voyant s'allumait.

    Au retour, je ne suis plus saoulé par l'amoureux transi mais, ce qu'il peut m'excéder; je lui ai demandé de passer devant moi, supposant que la Clio va moins vite que ma Safrane.  Un fada, gare aux radars, à chaque sortie d'agglomération, je l'ai perdu de vue, il doit ralentir sérieusement pour que je puisse recoller à ses roues; pour corser, il déboule dans la cour de la gendarmerie d'Avigny comme à l'arrivée d'un rallye.

    - L'habitude de conduire en brousse, il ne faut pas ralentir, sur les tôles ondulées, il faut garder le même rythme et puis elle a du jus cette caisse, nerveuse, maniable, agréable, bien envie de l'acheter pour faire de la ville et des petits parcours.

    - Elle a peut-être véhiculé quelqu'un d'autre, un auto-stoppeur, oui, c'est cela, nous la connaissions bien, elle était capable de prendre n'importe qui, un dégoûtant qui a laissé traîné ses restes.

    Toujours aussi décevants ces gendarmes mais ils n'ont pas torts, nous sommes toujours prêts à nous enflammer au moindre indice inhabituel.

    J'arrache une promesse du chef pour qu'il m'avertisse dès qu'il y a du nouveau du côté de Salvati-Desbois

     

    Le garagiste commence son cinéma en examinant la Clio.

    - Une voiture immobilisée plus de six mois, c’est mauvais comme tout, et puis en plein air, en plein soleil, les durits durcissent, les joints s'écaillent, la peinture passe, les câbles se grippent.....

    Jean-François met fin à la litanie et se proposant comme acheteur; du coup, changement de disque.

    - Je vous la révise, change ce qui déconne et vous avez une merveille, vous avez vu,  c'est le modèle haut de gamme, douze mille bornes, une femme en première main, moteur pas brutalisé.

    Si, monsieur le garagiste, je peux vous le garantir, durant les deux cents dernières bornes le pauvre moulin a en enduré plus que dans toute sa vie  de  mécanique.

    Pendant que Jean-François se restaure un peu, je vais rendre compte au dames Parély de la réussite de notre mission, la tante Simone trouve un moyen pour convaincre son neveu de rester en sa compagnie.

    La châtelaine ne pose aucune question, je lui confirme que nous avons récupéré le véhicule et qu’il est au garage.

    Sophie me semble plus détendue que ce matin, elle m'accompagne en sortant et nous bavardons.

    - Bien gentil Jean-François, c’est un brave garçon, il me fait une cour assidue vous avez remarqué.

    - Je le comprends.

    - Je n'ose lui avouer que j'ai un homme dans ma vie, personne n'est au courant, seule Anne le savait, et Amandine,  ce n’est plus une enfant, vous aussi maintenant, je vais faire de la peine à maman.

    - Vous croyez, elle sait que vous ne pouvez continuer à vivre avec le souvenir de son fils et puis je crois savoir que vous étiez séparés avant son accident?

    - Justement, je fréquentais déjà mon ami qui n'est autre que mon associé l'architecte, imaginez la situation.

    Je  conseille à Sophie de tout dévoiler en nuançant si possible, surtout pour éviter les tourments de Jean-François.

    - Merci cousin de vos bons conseils.

    Je redescends vers le village et croise l'ancien maire gai luron qui me barre pratiquement le passage vers la place.

    - Monsieur de "La Gazette Républicaine", ça va toujours? vous vous plaisez bien chez nous, de la bonne air.

    Bien gentil, le pépé,  mais je n'ai pas envie de parler de l'air ni de débiter des paroles oiseuses; et sa bonne air dont il chante les louanges, est un peu parfumée aux vapeurs d'ensilage et aux effluves de lisier.


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  • L’assomption

    Le 15 août, c’est la fête de la Vierge Marie, cette fête religieuse était célébrée avec faste. Dans de nombreux villages, une procession se déroulait dans les rues, quelques hommes solides portaient une statue de la Vierge, suivant le prêtre abrité par un dais et précédant les paroissiens. Entourant la statue, marchaient des fillettes vêtues de blanc et portant des petits paniers contenant des pétales de roses qu’elles jetaient de temps en temps. Les rues étaient décorées de fleurs, parfois de rosaces et, dans plusieurs quartiers, étaient installés des reposoirs, édifices provisoires magnifiquement décorés et fleuris. La procession marquait un temps d’arrêt à chaque reposoir, des prières étaient récitées, des cantiques étaient chantés.  

     


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  • Je me demande quelle va être la réaction de Gino Mathieu, personnellement je suis ennuyé, cela aurait pu être pire, irrémédiable, nous avions peur que Pierre Salvati ne règle son contentieux de façon violente, et c’est lui la victime d'une tentative d'assassinat, quelle chance inouïe pour lui et par ricochet pour Gino et moi, je fonce à la gendarmerie d'Avigny pour recueillir les dernières informations.

    - Vous êtes en avance, nous préparons un compte-rendu pour la presse, je peux simplement vous dire que monsieur Salvati est hors de danger, il est encore à l'hôpital de Mareilles, choqué psychologiquement, il a bénéficié d'un concours de circonstances que nous pouvons qualifier de miraculeux.

    L'adjudant  Cavalier m'explique que l'industriel était dans les bois et qu’au moment de reprendre son véhicule, il a reçu une balle de carabine en pleine poitrine, coup de chance, il venait de faire un relevé de grumes et avait glissé le listing et son support métallique dans son blouson; protection providentielle, il a foncé dans sa voiture avant qu'un second coup de feu éclate, il n'a pas eu la possibilité de voir son agresseur qui devait être caché derrière un arbre.

    - Vous aurez les détails techniques dans le rapport, le capitaine Henry est chargé de l'enquête, pour le moment nous pensons à une vengeance, celle d'un ouvrier licencié, ou à  une rivalité professionnelle.

    Il m'est difficile de dévoiler directement ce que je suppose, si cette agression est liée à l'affaire de Morigny, la détermination des assassins est grande et d'autres personnes sont en danger, je pense aux frères Mathieu.

    - Monsieur Salvati ne vous a pas donné d'indications concernant son agresseur? Se sentait-il menacé? dans son entourage, parmi ses amis?

    - Vous n'auriez pas une petite idée derrière la tête ou un renseignement important? si vous savez quelque chose, soyez assez aimable pour nous en informer, la vie d'autres personnes est probablement en jeu.

    Le militaire a raison et je ne peux garder plus longtemps ce que je sais, je résume l’affaire de la reconnaissance de dette, les soupçons des frères Mathieu et de Pierre Salvati.

    - Merci de votre collaboration, effectivement, nous avons quelques indications dans ce sens, nous assurons une protection autour de certains témoins capitaux, nous interrogeons un suspect, nous soupçonnons des complicités, vous comprenez, l'enquête débute et nous ne pouvons tout dévoiler.

    Je me doutais que l'aîné des Mathieu cherchait à me contacter, je parviens à le joindre dans sa voiture.

    - J'arrive juste devant chez moi, j'ai appelé à votre bureau, comment se fait-il que vous n'ayez pas encore le téléphone dans la bagnole, c'est indispensable de nos jours?

    Je suis d'accord, quoique je ne pousse pas trop dans cette direction, arme à double tranchant, fini la liberté, nous y arrivons un jour, c'est inéluctable et puis les prix ont sérieusement fondus, c'était l'obstacle naturel pour monsieur le PDG.

    - Je suis sous surveillance de la gendarmerie, enfin discrètement, j’ai parlé de cette affaire de falsification,  à votre avis, qui a vendu la mèche, pas moi et  vous encore moins, je suppose, une écoute téléphonique? J'ai fais contrôler mes appareils, rien.

    - Nous étions bien seuls chez vous, vos employés ne peuvent capter les conversations, un standard, un autre appareil?

    - Non, impossible, j’ai un système protégé, le contraire oui.

    - Alors à l'autre bout? et le toubib?

    - Pas Maurice, reste des fuites possibles chez Pierrot, son installation téléphonique est archaïque, chacun peut écouter le voisin, sa secrétaire, son contremaître à la scierie, sa femme, à mon avis c'est de là que proviennent les fuites.

     

    J'ai pris contact avec le commissariat central de Châlons-sur-Marne, je dois passer à Morigny prendre une procuration signée par madame Parély qui finalement accepte que la voiture soit rapatriée dans le secteur, Jean-François m'accompagne pour ramener la Clio chez un garagiste d'Avigny.

    Je passe à la gendarmerie, récolter d'éventuels renseignements complémentaires, le compte-rendu fournit à la presse par le capitaine est plus que succinct, cette discrétion sent le gros poisson.

    Le" blessé’ se porte comme un charme, normal pour un homme des bois, il n'en est pas de même de l'autre Desbois, le vrai, Vincent, hospitalisé après une crise cardiaque, les soupçons se sont dirigés vers lui à grandes enjambées, les gendarmes, hommes de terrain, eux, ont appris que, contrairement à ce que pensait Gino, madame Salvati entretenait encore des relations coupables avec le promoteur, épisodiques certes mais néanmoins suffisantes pour que Vincent Desbois soit averti du danger qui le menaçait, peur réelle pour sa vie, peur de découvertes frauduleuses, le promoteur n'est pas en mesure de répondre aux questions. Je suggère à la gendarmerie de parler de la somme inscrite sur la reconnaissance de dette à ce monsieur dès qu'il se réveillera et de réclamer le fameux billet au détenteur actuel, maître Cochet.

    - Délicat, le notaire a le bras long, il nous faudrait quelques preuves supplémentaires, je vais en parler à ma hiérarchie.

     

    - Vous êtes notre sauveur, Jean-François a eu une excellente idée de vous contacter, avec cette tentative d’assassinat, les bandits se sont trahis.

    Simone Louyot s’enflamme un peu vite, j’apporte un bémol à sa fougue.

    - Le coup de feu est peut-être étranger à notre affaire.

    - M’étonnerait, attendez la suite.

     


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  • Le glanage

    Le glanage

    Quand la moisson est finie, et avant le déchaumage, quelques personnes du village aux faibles revenus viennent glaner dans les éteules de blé. Souvent des femmes et des enfants qui ramassent les épis qui se sont échappé des gerbes. Cette pratique est admise par l’agriculteur, les épis récoltés sont égrenés à la main, le grain récupéré sert à l’alimentation de la volaille.

    Il arrive que certains glaneurs n’attendent pas le ramassage des tas et viennent prélever des épis sur les gerbes, si l’agriculteur les surprend, ils sont par la suite interdits de glanage.

     


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  • Martine est ravie de l'invitation de Simone Louyot.

    - J'aime bien la campagne et puis je vais voir ta noble cousine.

    La tante de Jean-François m’avait téléphoné pour me confirmer son aimable invitation, je l’avais sommairement mise au courant du résultat de mes premières investigations.

    - Voyez que nous sommes dans le vrai, j’étais certaine que cette histoire de reconnaissance de dette était la clé de l’affaire...nous en reparlerons lors de votre visite, mais surtout pas devant madame Parély.

     

    Sophie est conforme au portrait tracé par Simone, elle a beaucoup de charme, c’est aussi l’avis de Jean-François qui ne la quitte plus des yeux.

     

    Madame Parély parle de la messe à laquelle elle a assisté le matin, tante Simone avait trop de travail pour s'y rendre.

    - Et puis, une messe chaque mois, j'ai perdu l'habitude, le curé est pressé, il se dépêche et mange la moitié des prières, il faut le comprendre, il a cinq paroisses à sa charge...la messe ! encore une tradition qui va disparaître dans nos campagnes.

    Que dire du menu, à l'image de notre hôtesse d'un jour, gai, généreux, chaleureux, tante Simone est un vrai cordon bleu.

    Et le décor ? surprenant sur le coup puis finalement agréable, intime; la salle à manger de madame Louyot n'a pas de fenêtre ; imbriquée dans la grande maison, une porte vitrée donne dans l'entrée alors que l'éclairage principal tombe d'une verrière, en plein milieu  de la table ronde, diffusant une lumière un peu irréelle ; les ombres sont repoussées contre les murs, la vue d'un ciel nuageux, au-dessus de la vitre, donne une impression curieuse, la luminosité et la profondeur de champ empêchent de lever trop souvent les yeux au risque de ressentir comme une sorte de vertige.

    Le retour à la normale dans la véranda me permet de bavarder un peu plus longuement avec Sophie.

    - Imaginez la douleur de maman, le corps d'Anne n'a jamais été retrouvé, c'est encore plus terrible, si elle a été victime d'un meurtre comme nous le supposons, les assassins ont réussis à la faire disparaître à tout jamais.

    - Et la voiture, qu'est-elle devenue?

    - C'est vrai, nous devrions pouvoir la récupérer, elle est entre les mains de la police de Châlons-sur-Marne je crois, je vais me renseigner à ce sujet.

    - Aucun indice dans le véhicule, une lettre?

    - Nous ne savons que peu de choses concernant le véhicule, les policiers ont été avares  de renseignements.

    - Je vais demander à madame Parély de prendre des nouvelles de ce véhicule, qu’en pensez-vous ?

    - Vous allez raviver sa peine, je suis certaine qu’elle ne désire plus revoir la Clio d'Anne dans la cour du château,  à mon avis, il faudra confier cette voiture à un garage pour la mettre en vente... si la police nous là restitue. Vous pourriez nous conseiller à ce sujet?

    Je propose de m'en occuper, j'aimerais questionner les policiers qui se sont occupés de cette affaire.

    Sophie est d'accord et me promet d'obtenir l'aval de sa belle-mère.

    - Je vais me débrouiller pour l'amener sur le sujet avec douceur, elle est d’une telle sensibilité.

    Nous parlons encore longuement de sa belle-sœur qu'elle estimait beaucoup.

    - Elle était véritablement une sœur pour moi, avant l'accident d'Alexandre, elle avait compris que je ne pouvais plus vivre avec un être pareil, l'avenir moral d'Amandine était en jeu, mon équilibre aussi, elle m'a aidé à passer le cap particulièrement difficile de la séparation, ménageant sa maman et la préparant à cette rupture qui allait lui faire de la peine, ensuite, Anne a loué un appartement au-dessus du mien, elle me secondait dans les tâches ménagères, s'occupait de sa nièce, en plus de ses actions humanitaires.

    J'osais aborder d’autres questions.

    - D’après les dires, c’était une jolie femme et elle avait d’autres qualités, ses rapports avec les hommes ?

    - Elle avait connu plusieurs hommes avant de venir s'installer à Reims, elle me racontait absolument tout, puis elle avait rencontré un monsieur nettement plus âgé qu'elle ,un veuf qui militait également dans différentes associations humanitaires, malheureusement cet ami est décédé début de l'an dernier; elle en était profondément affectée mais ce n'est pas ce drame qui l'aurait poussé à se donner la mort, elle savait que de nombreuses personnes avaient encore besoin d'elles, y compris Amandine et moi...sans oublier sa maman qu’elle vénérait.

     

    Ce que je craignais sans vouloir y penser, la vue de la fermette en cours de rénovation séduit Martine.

    Jean-François nous proposait une visite de sa fermette en rénovation, Sophie, Martine et moi acceptions.

    - Ce serait super, une belle maison ancienne, avec une telle cheminée, tu sens ces relents de suie, cette odeur de boiserie, enivrant.

    Contrairement à moi, elle ne hume que ce qu'elle veut, elle a un odorat sélectif, ce n'est pas mon cas et dans ce chantier, je respire plutôt des émanations de ciment frais, de colle à carrelage et de peinture.

      

    Nous continuons à faire le tour de Morigny à pieds, Martine est heureuse de voir la fameuse fontaine, elle n'arrête pas de boire à la sortie du tuyau.

    Je lui conseille de modérer, because les nitrates.

    - Elle est bonne pourtant, ah oui, un peu âcre tout de même.

    - Tu veux vivre longtemps avoue.

    - Si tu restes avec moi jusqu'au bout d'accord.

    Je veux bien la croire.

    Par contre Sophie dédaigne l'eau fraîche.

    - Chaque fois que j'en ai bu, j'ai eu des nausées.

    Nous sommes pris dans une nasse au fond de la fontaine, deux villageois d'un  âge certain viennent de descendre l’escalier de gauche et commence à nous seriner.

    L'un est un vrai boute-en-train, il exagère, avec le bout de sa cane, il tente de soulever la jupe de Sophie.

    - C’est quelle a des belles jambes la gamine, et l’autre dame ça doit être le même paysage.

    Le deuxième est encore plus âgé, il sourit de sa bouche complètement édenté; deux beaux spécimens.

    Les femmes sont amusées, Jean-François s'énerve un peu.

    Enfin le grand père devient plus raisonnable.

    - J'la connais la belle Sophie, elle sait bien que je suis un farceur, que je n’suis pas méchant... on compte sur vous monsieur Laurent pour foutre ces vampires à la porte, de mon temps cela ne se serait pas passé ainsi, croyez-moi; j'ai été maire de Morigny pendant vingt cinq ans cher monsieur, c'est vous dire, de 45 à 70, j'vais avoir quatre vingt huit ans à la Noël, si j’y arrive...et  regardez-moi ce  jeune homme  qui rit comme un gosse qui vient de naître, il a passé les cent ans, du solide.

    - La fontaine?

    - Pensez-vous, faut pas le dire, il n'y a que les femmes qui boivent de l'eau à Morigny, ll' Adrien il fait encore son pinard, une sacrée piquette, refusez si il vous en offre, sinon votre estomac ne s’en remettra jamais... Cette flotte ne convient même pas au pastis, le mélange se fait difficilement.

    Notre escorte continue à nous seriner jusque devant la maison de madame Louyot.

    - Si vous voulez nous parler, nous avons notre quartier général devant l'ancienne boulangerie, de l'autre côté de la place, face au puits transformé en bouquet de fleurs.

    …………


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