• La fontaine de jouvence (1)

    Je vous propose un récit, le narrateur, Laurent Passy, est journaliste dans un quotidien régional, il est spécialisé dans les faits-divers et il lui arrive d’effectuer des recherches concernant des événements où plane un certain mystère.

      

    - Je suis Jean-François, Jean-François Delacour, souviens-toi, Morigny, les grandes vacances, il y a...je ne sais plus exactement?

    La sonnerie du téléphone m’avait fait sursauter, j’étais plongé dans la lecture d’un article  écrit par un stagiaire, un récit banal que le jeune homme avait essayé de traiter de manière humoristique mais que je ne parvenais pas à comprendre.

    Morigny, je connais cette localité, elle est située dans notre zone d’édition, mais les abonnés de "La Gazette Républicaine" ne doivent plus être nombreux, en feuilletant chaque édition comme je m’efforce de le faire chaque jour, je vois passer quelques informations locales et, comme c'est malheureusement le cas pour de nombreux villages en déclin, ce sont surtout les nécrologies qui défrayent la chronique.

    Les grandes vacances? Je crois me souvenir qu’effectivement j'ai passé une ou deux semaines  à Morigny, je devais avoir six ou sept ans, quelques jours chez un oncle colonel qui avait une résidence secondaire dans ce village.

    Jean-François Delacour ? Ce nom ne me dit rien du tout.

    - Tu es bien Laurent De Rougemont?

     Bien entendu, quoique, j'ai presque oublié mon vrai patronyme que je n'emploie plus que dans les actes officiels, Passy, mon nom de guerre comme je dis, me convient mieux, c'est le nom de famille de ma mère.

    - Mon grand père habitait juste à côté de chez ton oncle, une petite ferme, la dernière habitation sur la route de Souville, tu venais jouer avec moi dans la grange, j'étais un peu plus âgé que toi... je le suis toujours....

    Sacrée mémoire ce Jean-François, si il le dit, je veux bien le croire, j'ai pourtant beaucoup de souvenirs de mon enfance, cet épisode de ma vie est un peu éventé.

    - Mes grands-parents avaient un gros chien noir, tu lui montais sur le dos, j'ai des photos.

    Un chien maintenant... c'est ma foi vrai... je revois ce gros toutou, j'ai complètement oublié le gamin, pas le chien.

    - OK, ces souvenirs me reviennent, que deviens-tu?

    - Je travaillais en Afrique, je viens de rentrer définitivement en Europe, j'aimerais te rencontrer, c'est possible?

    - Bien entendu, quand tu veux, tu me préviens quelques jours avant, je m’absente assez souvent.

    - J'aurais une affaire à te soumettre.

    Comme chaque année, cette période de vacances qui commence est calme, relâche dans les tribunaux, moins d’accidents, je meuble comme je peux, ressortant comme toujours en pareil cas, d'anciennes affaires non élucidées, c'est fou le nombre de criminels qui continuent à vivre impunis. Ce genre de reprise n'est pas toujours fortuite, j'essaye de gratter un peu plus les indices existants et il arrive que des témoins qui ne s'étaient pas manifestés parce qu'ils pensaient que leur témoignage était inutile ou insignifiant prennent contact avec la police ou la gendarmerie, quelques dossiers en sommeil reviennent à la surface.

    L'ambiance au bureau est un peu plus cool durant cette période, d’autant plus que le boss est parti en croisière, je me demande dans quel état il se trouve, lui qui a déjà le mal de mer dans l’ascenseur.

     

    Sympa Jean-François Delacour, il dit me reconnaître, je veux bien, près de trente ans se sont écoulés, j'ai tout de même changé.  Bizarre, quand je l'ai vu entrer dans le hall, j'ai de suite pensé que c'était lui, une certaine allure familière.

    - Alors, tu travaillais en Afrique ?

    - Oui, terminé pour moi, de toutes façons ce n'était plus agréable, en douze ans l'évolution n'a pas été dans le bon sens, les mentalités changent. J'étais en Côte d'Ivoire, à côté d'Abidjan, je travaillais pour une société spécialisée dans les bois tropicaux, enfin je travaille toujours pour la même boîte, le siège social est à Sète.

    - Tu as encore de la famille à Morigny ?

    - Oui,  une tante, la sœur de maman, elle est veuve, depuis mon retour, je suis allé lui rendre visite plusieurs fois, quinze ans que je n'avais pas mis les pieds dans ce village, il n’a pas changé, ou plutôt si, beaucoup de maisons vides, une population vieillissante, je suppose que ton activité journalistique  t'amène rarement dans de tels trous perdus.

    - C'est rare en effet.

    - Bon, tu imagines que je ne suis pas venu te voir uniquement pour ressasser de vieux souvenirs, je me fais un peu l'ambassadeur de plusieurs personnes de Morigny qui auraient besoin de tes bons offices, plusieurs personnes dont ma tante, c'est elle qui m'a parlé de ton journal, de toi, elle lit tes articles assidûment, c'est une fan.

    J’ignorais que j’avais  des fans, enfin une, c'est peut-être la seule, pas de chance ce  sont rarement de jeunes demoiselles qui me demandent des autographes... ni même les autres.

    - Et comment pourrais-je venir en aide à ces sympathiques campagnards?

    - Je vais te résumer la situation, mais une visite sur place et la rencontre avec certaines personnes, dont ma tante bien entendu, pourrait t'édifier sur le sérieux problème que connaît le village, est-ce possible?

    - Si le sujet s'assimile à des faits divers c'est envisageable.

    - Je sais que grâce à toi, des énigmes ont été résolues, des mystères dévoilés et des coupables confondus.

    - Ne me dit surtout pas que tu as entendu parler de moi en Afrique.

    - Même pour te faire plaisir, non, mais cela pouvait être possible, figure-toi qu'un collègue originaire de la région recevait votre journal, avec un décalage naturellement.... Bon, branle-bas de combat à Morigny et quand je dis combat, je n’exagère pas, c'est un village en état de siège que j'ai retrouvé, tout cela pour une histoire de source.

    ………..


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :